La bispiritualité, cette identité de genre autochtone mal connue

Envoyé par ALGI en date du 21 juin 2021 à 15h50


Une version du drapeau bispirituel
Photo : Radio-Canada / Graphisme : Camile Gauthier

 

Au mois de juin, deux célébrations convergent pour les personnes bispirituelles : le Mois national de l'histoire autochtone, qui honore l'héritage et la diversité des peuples autochtones, et le Mois des Fiertés, consacré à la visibilité des personnes LGBTQ+ ainsi qu’à la lutte aux actes discriminatoires dont ils sont victimes.

Le mois de juin est donc l'occasion de découvrir un pan de l’identité autochtone parfois méconnue : la bispiritualité, cette identité de genre propre aux Autochtones.

(...) D’après Tamara Touma, toutes les personnes autochtones qui appartiennent au spectre LGBTQ+ ne s’identifient pas comme des personnes bispirituelles. Mais cette identité de genre appartient exclusivement aux personnes autochtones et ne peut pas être empruntée par les personnes allochtones.

Source : Audrey Simon sur ici.radio-canada.ca La bispiritualité, cette identité de genre autochtone mal connue. 2021-06-21

Les Autochtones se réapproprient de plus en plus leur identité de genre. Les Premières Nations, Inuits et Métis sont chaque fois plus nombreux à s'identifier comme bispirituels, ou personnes « aux deux esprits » masculin et féminin – un terme popularisé il y a 25 ans par le militant canadien Albert McLeod, qui était de passage cette semaine à Montréal.

(...) Un geste politique, l’affirmation de son identité de genre? Du moins, elle aide à désapprendre la pensée dominante colonialiste, affirme Albert McLeod. « Beaucoup de Premières Nations se sont renommées avec leurs noms traditionnels. La communauté allosexuelle (queer) autochtone a fait cela avec la bispiritualité. Nous ne sommes pas différents des autres en termes de processus de décolonisation », souligne-t-il.

Alors que les termes comme « homosexuel » ou « gai » sont nés il y a quelques décennies seulement, « les idées autochtones sur le genre datent de milliers d’années », indique Albert McLeod.

De nombreuses cultures autochtones utilisaient des variations du terme « spirituel » pour décrire des personnes qui possèdent à la fois un esprit féminin et un autre masculin.

Dans les langues autochtones, des termes font référence à la sexualité ou au genre. En cri, napêw iskwêwisêhot représente un homme qui s’habille comme une femme, et înahpîkasoht, une femme qui s'habille et qui vit comme un homme. Les Inuits ont un quant à eux un « troisième genre », baptisé Sipiniq.

Aujourd’hui, être gai est encore tabou dans les communautés autochtones – un héritage de la colonisation et des outils d’assimilation culturelle comme les pensionnats, estime Albert McLeod. Des chercheurs avancent d'ailleurs que les homosexuels étaient traditionnellement beaucoup plus acceptés dans les communautés que dans les sociétés occidentales.

Source : Laurence Niosi sur ici.radio-canada.ca Bispiritualité : se réapproprier son identité de genre. 2017-11-11

Le Nunavut a récemment accueilli une nouvelle édition des célébrations de la fierté gaie après plus de 10 ans d'absence. La préparation de l'événement, dans une région où on peine encore à (re)trouver les mots pour décrire les réalités de la communauté LGBTQ, a fait l'objet d'un documentaire, Two Soft Things and Two Hard Things, présenté dans le cadre du festival Présence autochtone.

« Two soft things » et « two hard things » (deux choses douces et deux choses dures [qui se frottent], en français), c’est une traduction un peu grossière des mots « lesbienne » et « gai » en inuktitut.

Il aura fallu beaucoup de temps à la population locale, particulièrement à la jeunesse, pour retrouver ces expressions, enfouies sous des siècles de politiques d’assimilation mises en place par le gouvernement canadien et l’Église catholique.

Le documentaire, réalisé et produit par Mark Kenneth Woods et Michael Yerxa, des cinéastes connus pour leur implication dans la cause LGBTQ2, donne la parole à différentes générations d’Inuits qui se succèdent pour parler de leur identité qu’on a tenté d’effacer à plus d’une reprise dans l’histoire.

 À travers leurs témoignages, on apprend que la tradition inuite a toujours fait une grande place à la diversité sexuelle, qu'il soit question de genre ou d'orientation.

C’est avec l’arrivée massive de missionnaires chrétiens au tournant des années 50 que le modèle hétéronormatif s’est imposé, de même que la pudeur et la honte associée à l’acte sexuel, raconte Jerald Sabin, doctorant en sciences politiques à l’Université de Toronto, dans le documentaire.

La polygamie, qui était autrefois assez répandue (parmi les couples hétérosexuels ou homosexuels), a également été complètement évacuée de la société inuite en vertu de ces mêmes préceptes religieux.

(...) Les conséquences de la domination de l’Église catholique se sont fait sentir durant de nombreuses années. En plus de la question morale judéo-chrétienne, les épisodes répétés et documentés d’abus au sein des pensionnats gérés par des prêtres ont contribué au développement de la méfiance à l’égard de la différence sexuelle.

(...) Nuka Fennell, également d’Iqaluit, explique pour sa part qu’il s’est senti obligé de quitter la communauté pour préserver sa santé psychologique et physique après un coming out forcé durant son adolescence. « J'avais le soutien de mes parents, mais à l'école, dans la rue, comme nous provenons d'un petit milieu, les gens me regardaient et jugeaient qui j'étais. Je me faisais battre. Je n'allais pas attendre le coup de trop. »

« J’ai choisi d’être un sans-abri à Ottawa plutôt que de retourner à la maison […] J’ai choisi de partir pour survivre », précise-t-il.

(...) Mark Kenneth Woods et Michael Yerxa ont constaté au cours de leur tournage qu'il restait encore des combats à mener pour la reconnaissance des minorités sexuelles au Nunavut, mais assurent que le transfert des connaissances et la réconciliation avec le passé sont bien entamés.

Visionner la bande annonce du film (en anglais).

Source : Vanessa Destiné ici.radio-canada.ca Détabouiser la sexualité inuite, un mot à la fois. 2017-08-10

Jesse Mike, une Inuite d'Iqaluit, au Nunavut, décrit les défis auxquels sont confrontés
les membres de la communauté LGBTQ de son territoire dans le film
« Two Soft Things, Two Hard Things ». Photo : MKW Productions Inc.

 


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