La situation des gays russes est « bien pire » qu'au XIXe siècle

Par Komitid / AFP en date du 12 février 2023 à 11h56

« C'est bien pire que du temps de Tchaïkovski » : pour le réalisateur Kirill Serebrennikov, « la violence » de l'Etat russe à l'égard des gays et de la communauté LGBTQ a atteint un niveau « d'hystérie ».


Kirill Serebrennikov en 2014 - magicinfoto / Shutterstock
photo publiée avec l'article de Komitid

L’artiste, dont le film sur la femme oubliée du célèbre compositeur sort en salle en France mercredi, a également affirmé à l’AFP que la société russe est actuellement « paralysée par la peur » et dans l’impossibilité d’exprimer « le moindre doute » concernant l’invasion en Ukraine déclenchée il y a près d’un an.

« Dans le cercle d’amis qui entouraient Tchaïkovski (qui était gay), mais aussi chez les fonctionnaires haut placés, les grands princes, les proches du tsar, il y avait beaucoup d’homosexuels qui l’étaient ouvertement », rappelle M. Serebrennikov, qui avait présenté La Femme de Tchaïkovski à Cannes en 2022.

« Tchaïkovski n’avait pas honte d’être homosexuel ; le stress qu’il ressentait n’était pas à cause de la pression sociale mais parce qu’il avait l’impression que le fait de ne pas avoir “la bonne orientation sexuelle” allait être un problème pour écrire sa musique », ajoute le réalisateur de 53 ans, basé à Berlin depuis qu’il a quitté la Russie deux mois après l’invasion.

« Aujourd’hui, c’est bien pire, parce que l’Etat s’est octroyé le droit de recourir à la violence envers les LGBT, c’est une situation extrêmement discriminatoire qui frôle l’absurde », ajoute-t-il, estimant qu’à chaque fois que des députés russes veulent se faire remarquer, ils proposent des lois anti-LGBT.

D’après lui, « l’hystérie a atteint son comble » avec la sortie en 2021 d’un roman écrit par Elena Malisova et Katerina Silvanova.

Cette histoire d’amour de deux jeunes hommes dans un camp de pionniers (l’organisation de jeunesse soviétique) est devenu un best-seller chez la jeunesse russe.

« Elles ont été accusées d’être des agents de l’étranger et des députés sont allés jusqu’à dire que si les gens lisaient le roman, ils deviendraient gays… ».

M. Serebrennikov assure que la société russe est aujourd’hui « complètement paralysée par la peur, car l’Etat s’est octroyé le droit d’exercer la violence ; et les artistes ne peuvent plus protester ou même émettre des doutes » ou même d’exprimer de la compassion pour les Ukrainiens, « car c’est devenu dangereux ».

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