Beau témoignage de Denis-Martin Chabot

Envoyé par Catou en date du 22 décembre 2016 à 15h55
en réponse à Journée mondiale du sida (reçu de Agence de la santé publique du Canada / via ALGI le 02 décembre 2016 à 14h31).

À l'occasion de la Journée mondiale du sada, le journaliste Louis-Martin Chabot, maintenant à la retraite, et toujours écrivain, livrait sur son blogue un témoignage inspirant sur la vie avec le sida.

Je n’ai plus peur. Je n’ai plus honte. Je ne me cache plus.

Denis-Martin Chabot

Denis-Martin Chabot

Je suis séropositif depuis 12 ans.

Voilà, c’est dit.
 
Il y a 12 ans, mon monde s’écroulait sous mes pieds.
 
J’ai eu peur.
 
D’abord, j’ai eu peur de mourir. Je n’étais pas prêt à mourir — l’est-on vraiment ? J’ai eu peur aussi d’être malade et de souffrir. J’ai eu peur également que le virus m’enlaidisse et déforme mon corps, un drame pour un homosexuel, car le « look » est tout dans le monde gai.
 
J’ai eu honte.
 
J’ai attrapé le VIH à cause de relations sexuelles non protégées et non d’une façon moins compromettante, comme une transfusion sanguine ou un accident quelconque. Si seulement on pouvait attraper ça sur un banc de toilette…
 
J’ai eu peur.
 
J’ai eu peur d’être ostracisé. J’ai eu peur de la réaction des miens, et que mes amis me rejettent. J’ai eu peur également au travail que mes patrons me mettent de côté. Ce ne fut pas le cas heureusement.
 
J’ai eu honte.
 
Je ne voulais pas qu’on me juge et qu’on me dise que j’ai eu ce que je méritais pour ne pas avoir utilisé le préservatif, quand finalement je n’avais besoin de personne pour me culpabiliser, j’y arrivais très bien, moi-même.
 
J’ai eu peur.
 
J’ai eu peur de l’intimité, qu’on me rejette quand je dirais que je suis séropo, ce qui est arrivé dans plus de 90 % des cas. J’ai eu peur qu’on m’intente un procès, même si je prends soin de révéler mon statut sérologique avant d’être intime, même si je NOUS protège, moi et mon partenaire, en insistant sur le préservatif. En plus, je suis indétectable, et selon le Consensus d’experts de l’Institut national de santé publique du Québec, « un traitement antirétroviral efficace qui abaisse la charge virale à un niveau indétectable réduit de manière significative le risque de transmission du VIH ».
 
J’ai eu honte
 
J’ai eu honte de mon corps, honte de ma maladie, honte de moi. J’ai gardé le silence. Et pourtant, je suis chanceux. J’ai accès aux meilleurs médecins et aux meilleurs traitements et médicaments disponibles. J’ai une assurance qui paye tout ça. Je vis très bien avec ma condition. Je m’entraîne trois fois par semaine et je cours entre 6 à 10 km également trois fois par semaine. J’ai pu continuer ma carrière de journaliste à la télévision et à la radio, et couvrir les nouvelles au quotidien et travailler de longues heures stressantes sans me plaindre de ma santé. J’ai voyagé plusieurs fois au Canada, aux États-Unis, en Europe et en Afrique, sans problème. Et preuve supplémentaire qu’on peut bien vivre avec ce virus, j’ai une vie amoureuse qui me comble avec un homme formidable.
 
J’ai commencé à m’ouvrir très récemment auprès de certains amis. Je l’ai fait aussi à mon lieu de travail. Dans ce dernier cas, je préparais mon départ à la retraite, je n’avais plus rien à perdre. Ce n’était pas très brave de ma part. Or, comme journaliste et communicateur, je sais parler.
 
En cette journée mondiale du SIDA, alors que je lance mon deuxième roman aux éditions La Semaine, Il y a longtemps que je t’aime, je ne t’oublierai jamais, qui porte en grande partie sur les ravages de cette maladie chez les hommes gais, j’ai décidé de ne plus me taire. J’utilise le peu de notoriété que j’ai en tant que journaliste depuis plus de 32 ans, entre autres à la télévision et à la radio publiques, et en tant qu’écrivain, pour dire tout haut ce que d’autres souffrent en silence. Pour lancer mon cri du cœur.
 
Je n’ai plus peur. Je n’ai plus honte. Je ne me cache plus.
 
Le VIH/SIDA est tombé dans l’oubli ces dernières années, car il n’y a plus la même urgence avec la trithérapie qui permet à la plupart des personnes infectées de mener une vie normale. Il est vrai que les nouvelles sont encourageantes concernant le VIH. Les nouvelles infections sont en baisse. Il y a 15 ans, on en comptait 900 annuellement au Québec. De nos jours, on en dénombre moins de 300 de nos jours par année. Grâce au dépistage, au traitement des personnes infectées et aux mesures de prévention, on peut envisager la fin du VIH dans un avenir prochain. Or, selon les estimations de l’Agence canadienne de la santé, 21 pour cent des personnes vivant avec le SIDA ignorent qu’elles sont séropositives. Voilà un premier grand défi à relever dans la lutte contre cette maladie. Et tout ça coûte cher. L’argent est encore une fois le nerf de la guerre.
 
L’infection au VIH va au-delà de relations sexuelles non protégées. Si tel était le cas, la maladie aurait été enrayée depuis longtemps. Or, on sait que des gens choisissent de ne pas utiliser le préservatif. Dites-moi pourquoi des gens fument encore quand on sait que la cigarette peut causer le cancer du poumon, pourquoi certains vont au salon de bronzage ou s’exposent au Soleil quand on sait que cela augmente les risques du mélanome, je pourrai peut-être vous dire pourquoi on a encore des relations sexuelles à risque.
 
Or, on a la condamnation facile et la compassion ardue. Je ne cherche pas à justifier mes comportements à risque ni ceux des autres. Je demande juste un peu plus d’humanité. Peut-être alors pourrons-nous mettre fin à cette maladie !
 
Denis-Martin Chabot

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