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Une référence incontournable

Envoyé par GDMANIMARÉFÈRE en date du 02 avril 2001 à 10h32

(source "http://www.canoe.qc.ca/ArtdevivreSocieteImages/leboeuf.jpg")

http://www.fugues.com/mariage/
Le mariage pour les gais et lesbiennes :
Futur inéluctable


Recherche effectuée par Ann Robinson, professeure à la Faculté de droit de l'Université Laval, pour le compte de Michael Hendricks et René Leboeuf, aspirants au mariage civil. 20 janvier 2000

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Je reproduis ici l'Épilogue, mais vous invite à imprimer et lire l'ensemble du document qui demeure unique en son genre.

Épilogue


(source "http://www.canoe.qc.ca/ArtdevivreSocieteImages/mariage.jpg")

Des mariages pour les gais? Naturellement!



[…] [I]nvoquer le droit romain et ses successeurs, le droit canon puis le Code civil de 1804 [Code Napoléon], qui ont façonné la pensée française sur le mariage et la parentalité, pour reculer face à la demande des homosexuels d'accéder au mariage et au droit d'élever des enfants, revient à oublier que « les fondements de notre culture » sont la Grèce et sa pédérastie pédagogique, Rome et sa polymorphie sexuelle parallèle à l'institution du mariage. Cette invocation n'a, aux yeux de l'anthropologue que je suis, guère plus de sens que de s'opposer au nom de la tradition religieuse ou de celle de la division sexuelle des tâches, au droit qu'ont aujourd'hui les femmes de contrôler la procréation, d'entrer sur le marché du travail et de partager la responsabilité parentale. Si la pensée scientifique a été à même de produire les moyens d'un contrôle efficace de la procréation, la pensée juridique devrait pouvoir faire preuve d'autant d'imagination et trouver des solutions au désir des personnes de même sexe de former des couples et d'élever des enfants.

Marie-Élisabeth Handman, « Sexualité et famille: approche anthropologique », dans Au-delà du PaCS, l'expertise familiale à l'épreuve de l'homosexualité.



Michael Hendricks et René LeBoeuf vivent une relation conjugale depuis 1975. Ils sont tous les deux citoyens canadiens, domiciliés au Québec. Ils travaillent tous les deux, payent des taxes à tous les paliers de gouvernement, sont intégrés dans leur milieu social, ont des amis, des parents, militent à l'occasion pour la cause gaie dans la région de Montréal. Dans leur relation de couple, ils partagent « les mêmes droits et obligations », se sont promis « mutuellement respect, fidélité, secours et assistance », et « font vie commune » 402 . Ils forment une cellule familiale, « assurent ensemble la direction morale et matérielle de la famille » 403 et ont choisi « ensemble le lieu de leur résidence » 404 . Aujourd'hui, Michael Hendricks et René LeBoeuf veulent exprimer publiquement cet engagement qu'ils ont contracté dans leur intimité, il y a plusieurs années. Ils veulent se marier. Ils demandent à être reconnus, au même titre que tout autre Canadien vivant dans le mariage, comme un couple constituant une force vive pour le pays, pour la province. En réalité, ils ne demandent que l'accès aux diverses lois de protection prévues en droit privé au Canada pour les couples mariés légalement.



Mais voilà, pour des motifs parfois nébuleux, sans vraiment les entendre et malgré l'adoption de la Loi 32 sur la reconnaissance des conjoints de fait homosexuels 405, l'État leur refuse encore l'accès au mariage. L'État se range alors du côté de l'obscurantisme et de l'occultation, semblant cautionner l'opinion que les homosexuels ne sont que des personnes déviantes, « pratiquant la transgression de la loi, la sodomie et la multiplication des partenaires » 404 , donc incapables d'amour profond, continu, quotidien. Mais lorsque les homosexuels « commencent à s'aimer, voilà le problème » 407 ! C'est alors que l'État ne sait plus sur quel pied danser, perd contenance, et se met en frais de consulter les bien-pensants. Mais l'État ne devrait-il pas plutôt à ce moment, faire table rase de tous ses préjugés et reprendre courageusement l'analyse des droits humains à la lumière des principes de démocratie inscrits dans ses diverses chartes et lois de la personne?

« Une distinction est discriminatoire au sens de l'article 15 si elle est susceptible de favoriser ou de perpétuer l'opinion que les individus lésés par cette distinction sont moins capables ou moins dignes d'être reconnus ou valorisés en tant qu'êtres humains ou en tant que membres de la société canadienne qui méritent le même intérêt, le même respect et la même considération. 408 » Cet extrait du jugement de Madame la juge Claire L'Heureux-Dubé dans l'arrêt Egan résume très bien les sentiments qu'ont ressentis Michael Hendricks et René LeBoeuf, le jour où un greffier du palais de justice de Montréal leur a refusé un permis de mariage. C'est à ce moment qu'ils ont pris conscience qu'aux yeux de la loi canadienne, ils étaient encore des sous-hommes, vivant dans un espace d'infra-droit. L'État leur a clairement indiqué qu'ils devaient retourner à la vie marginale dans leur ghetto, qu'ils n'avaient pas droit au même respect ni à la même considération que les autres canadiens hétérosexuels, hommes ou femmes.

Mais Michael Hendricks et René LeBoeuf n'entendent pas baisser les bras. Ils ont décidé au contraire d'affronter les préjugés de la société canadienne, voire de confronter les opinions des citoyens et citoyennes sur cette définition traditionnelle et parfois accommodante du mariage. Les juges des tribunaux les entendront-ils mieux que l'État? Sauront-ils cette fois encore amener l'État et les citoyens canadiens à franchir le cap du XXIième dans un attitude de non discrimination et de démocratie véritable à l'égard des gais et lesbiennes?
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Notes bibliographiques
402 Article 392 C.c.Q.
Les époux ont, en mariage, les mêmes droits et les mêmes obligations.Ils se doivent mutuellement respect, fidélité, secours et assistance.Ils sont tenus de faire vie commune.
403 Article 394 C.c.Q.
Ensemble, les époux assurent la direction morale et matérielle de la famille, exercent l'autorité parentale et assument les tâches qui en découlent.
404 Article 395 C.c.Q.
Les époux choisissent de concert la résidence familiale.En l'absence de choix exprès, la résidence familiale est présumée être celle où les membres de la famille habitent lorsqu'ils exercent leurs principales activités.
405 Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les conjoints de fait, 1999, chapitre 14.
406 Sylviane Agancinski, supra, note 378, p. 121.
407 Michel Foucault, Dits et Écrits, tome IV, Gallimard, Paris, 1994, p. 164.
408 Egan c. Canada, [1995] 2 R.C.S. 513, p. 553.


© Ann Robinson, 20 janvier 2000. Tous droits réservés par l'auteure.


Sur le couple Leboeuf-Hendricks
http://www.canoe.qc.ca/ArtdevivreSocieteGais/nov22_mariage_c-par.html

Un autre texte d'Ann Robinson :
http://www.canoe.qc.ca/ArtdevivreSocieteGais/nov22_mariage_a-par.html

http://www.canoe.qc.ca/ArtdevivreSocieteGais/nov22_mariage_b-par.html
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