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Témoignage

Envoyé par Farine en date du 14 mai 1999 à 01h49

(source http://www.webgraphique.com/images/3-thumbnail/Ciel052_01.jpg)

Bonjour tout le monde,

À la demande de GDMANIMA, j'ai fait le transfert du témoignage que je vous avais livré, le jour de la fête des mères, sur le bab "au quotidien".

Cette journée a été très éprouvante pour moi, ma mère me manque beaucoup. Je ne réalise pas encore tout à fait l'impact global de cette absence. J'ai parfois l'impression que le téléphone va sonner et que je vais entendre sa voix, mais il n'en est rien.

Je ne sais pas si j'arriverai un jour à parler d'elle ou à penser à elle sans être étranglée par les sanglots...



Hommage à ma mère…

Le 2 mars 1999, à l’hôpital St-Luc de Montréal, ma mère nous a quittés.

Le diabète, cette sournoise maladie, lui a volé son coeur, ses poumons, ses reins, et l’a beaucoup fait souffrir. Elle était hospitalisée depuis le début janvier et c’est avec une part de soulagement que nous avons accueilli sa délivrance.

Je veux, aujourd’hui, lui rendre hommage, puisque c’est définitivement à ma mère que nous devons, chez nous, cette ouverture d’esprit qui nous a permis de tendre l’oreille et le coeur à la réalité des autres.

L’homosexualité avouée d’un enfant n’est pas chose facile à accepter par des parents. Ils souhaitent évidemment ce qu’il y a de mieux pour leur progéniture et la société n’est pas encore prête à accueillir cette marginalité qui effraie. Parfois les parents ne peuvent supporter cette éventualité et refusent toute communication sur le sujet. Certains vont même jusqu’à chasser leur enfant ou encore l’incitent à consulter « le spécialiste » qui saura le ou la guérir de cette « étrange maladie ». C’est bien triste...

J’ai eu la chance d’avoir des parents compréhensifs et aimants. Mon auto-acceptation, je la leur dois. Le jour où je leur ai annoncé que j’étais lesbienne... ils savaient déjà. La transition s’est faite facilement et dans le respect mutuel.

Pour ma mère, l’important, c’était le bonheur de ses enfants, peu importe la route empruntée (il en est de même pour mon père, bien qu’il exprime plus difficilement ses sentiments). Ils ont toujours été là pour nous et nous sommes aujourd’hui une famille unie, «tricotée serrée», comme on dit. Le bel héritage qu’elle nous a laissé…

Ma mère était une femme généreuse et accueillante. C’était une «bonne vivante» qui avait le coeur à la fête et aux réunions animées. La table était toujours mise pour les amis, pour la famille, les portes bien grandes ouvertes aux nouveaux arrivants. Elle a toujours eu beaucoup de considération pour mes compagnes de vie et leur a fait une grande place au sein de la famille. Je lui en suis reconnaissante. Elle était fière de moi et n’hésitait jamais à prendre position face aux préjugés des « bien-pensant ». C’était une femme extraordinaire et je pleure maintenant son absence.

La tolérance, l’ouverture aux autres, l’acceptation de la différence, la générosité, telles étaient ses plus belles qualités. C’est sans nul doute le plus beau cadeau qu’elle pouvait nous faire; nous transmettre ses valeurs. Elle nous a permis de réaliser l’importance de la communication et nous a appris à bien gérer avec la complexité des relations humaines.

En vous parlant un peu de ma mère, je veux aussi rendre hommage à toutes les mamans, tous les papas qui soutiennent leur fille ou leur fils sur des voies qui sont parfois difficiles. Leur présence et leur amour souvent inconditionnel, sont des éléments importants dans nos vies. Le soutien moral de la famille, lors d’une « sortie de placard » est irremplaçable. Ce geste, difficile à poser, s’empreint de positivisme quand la famille accepte d’emblée notre orientation sexuelle. On nous permet ainsi de nous affirmer dans la différence, sans préjudices graves. C’est d’ailleurs souvent là que se détermine toute la perspective de nos relations avec autrui.

Je vous dis donc « merci »... merci pour mes compagnes lesbiennes; merci pour mes copains gais; pour tous ceux et celles qui ne vous disent pas tous les jours « je t’aime », mais qui, sans vous, ne sauraient certes pas assumer aussi facilement les difficultés inhérentes à cette marginalité.


Maman, je t’emporte avec moi et je t’aime
Tu peux maintenant te reposer… tu as fait du beau travail !

Farine...xxx

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