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Journal de Martin, 6 décembre 1998

Envoyé par COCTEAU en date du 6 décembre 1998 à 21h05
Je suis de retour du party que Michel avait décidé de faire pour sa fête. C'est pas mal niaiseux de faire un party pour sa propre fête. En tout cas, moi je préfère pas le dire. Moins le monde en sais, mieux c'est! La grosse Annie a colporté des menteries toute la soirée sur la pauvre Isabelle en disant qu'elle couchait avec tous les gars qui le lui demandait. Michel aurait même demandé à Isabelle de lui offrir une nuit avec elle comme cadeau de fête. En tout cas, c'est pas moi qui le lui demanderait. Moi, j'pense que je suis pas comme les autres gars. Michel a parlé de cul toute la veillée. C'est un beau gars, Michel, mais y manque de retenu, un peu. Les filles aiment pas tellement ça. Moi, la personne que j'aimerai aura pas honte de moi. Je sais garder ma place.
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Journal de Martin, 7 décembre 1998

Envoyé par Cocteau en date du 7 décembre 1998 à 22h21 en réponse à Journal de Martin, 6 décembre 1998 (reçu de COCTEAU le 6 décembre 1998 à 21h05).
J'ai revu Michel à la café du CEGEP. Il était avec sa gang de gnochons du hockey-cossom. J'ai jamais compris ce qu'ils trouvaient d'intéressants à courrir après une rondelle de feutre et à se sacrer des coups de bâton dans les jambes. Même Éric joue avec eux autres de temps en temps. Il est pourtant pas aussi épais qu'eux autres. Au moins, il trouve lui aussi que Michel charrie quand il parle de ses blondes qui à l'entendre parler lui font toutes sortes d'affaires que la descence m'interdit de nommer ici. Moi, je ne peux comprendre que deux êtres humains puissent faire de pareilles cochonneries. Éric n'a pas réagi quand je lui ai dit que je trouvais ça écoeurant. Il est un peu plus vieux que moi, peut-être qu'il en sait plus que moi. Je l'ai vu frencher avec Caroline au party chez Mélanie. Ils sont toujours ensembles lui et Caroline, mais Mélanie me dit qu'Éric lui as dit qu'il n'était pas tellement intéressé par Caro. Elle m'as dit aussi qu'Élisabeth lui avait dit qu'elle me trouvait de son goût. Je trouve ça le fun de le savoir, mais mes études avant tout. Peut-être que pendant les Fêtes je pourrais l'inviter au party de la parenté Poitras ? Cent cinquante queques dans une salle, plein de mononcles et de matantes, de cousins et cousines que tu vois une fois par année et que tu ne demandes qu'à pas revoir le reste de l'année. Ma mère va encore me demander de me trouver une blonde pour m'accompagner. Je vais peut-être en parler à Elisabeth. À moins que Mélanie vienne, ce serait moins compliquer!
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Journal de Martin, 14 décembre 1998

Envoyé par Cocteau en date du 14 décembre 1998 à 18h55 en réponse à Journal de Martin, 7 décembre 1998 (reçu de Cocteau le 7 décembre 1998 à 22h21).
Hier, je suis allé au cinéma avec Éric. Il avait choisi le film, un film en anglais pour pratiquer notre langue seconde, comme il m'avait dit. On est allé en ville voir HAPPINESS. J'ai trouvé ça écoeurant! C'est pas possible que du monde de même existe vraiment. Tout le monde est fucké la-dedans, le psy plus que tous les autres. C'est écoeurant. Moi, je sais pas, mais du monde comme ça, ça se peut pas! Je ne suis pas comme ça en tout cas. Les enfants ne m'intéressent pas et j'en aurai jamais. Je l'ai dit à ma mère, mais a refuse de me croire. Elle veut être grand-mère. Elle va faire un jump un de ces jours!

En fait, je le sais pas ce qui m'intéresse. Éric voulait discuter du film mais je me suis poussé. J'avais peur d'en parler, même d'y penser.

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Journal de Martin, 19 décembre 1998

Envoyé par Cocteau en date du 19 décembre 1998 à 22h17 en réponse à Journal de Martin, 14 décembre 1998 (reçu de Cocteau le 14 décembre 1998 à 18h55).
Samedi soir. Mon père écoute son hockey avec mon oncle Roger ( qui se fait appeler "RODGEURS")qui est venu rôter sa bière chez nous. Ma tante Annette jase dans la cuisine avec ma mère. La seule chose qu'elle a trouvé à me dire en me voyant c'est "As-tu une blonde, Martin? Tu vas pas passer le temps des Fêtes tout seul comme l'année passée, j'espère bien" Pis ma mère qui en remet. " Va falloir y'en trouver une, je crois bien, parce qu'il se force pas que le diable." Je suis descendu dans le sous-sol pour écouter ma musique tranquillement sans me faire chier.

Éric doit passer me prendre à 10h00 pour aller à la brasserie avec la gang du hockey-cossom. J'ai pas tellement goût de les voir, mais tout plutôt que de rester à jaser avec Matante Annette ou son gros épais de Roger Tanguay. Je vais proposer à Éric d'aller voir un film demain après-midi. American History X, y paraît que c'est trippant.

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Journal de Martin, 21 décembre 1998

Envoyé par Cocteau en date du 22 décembre 1998 à 22h36 en réponse à Journal de Martin, 19 décembre 1998 (reçu de Cocteau le 19 décembre 1998 à 22h17).
Noël s’en vient pis tous les problèmes qui vont avec. Éric veut bien qu’on aille au cinéma demain, mais y veut que je trouve une blonde pour l’accompagner lui pis sa nouvelle bonde, Catherine. J’ai pas ben le goût, mais je vais demander à Mélanie. Une sortie en gang au cinéma, c’est sûrement une idée de Catherine. On avait la paix avant ça. Là pas question d’aller voir le film que je voulais, c’est bien trop violent!! Nan! Nan! Une comédie « Shakespeare et Juliette » à la place. Shakespeare, c’est pas trop drôle habituellement, pis le beau Roméo meurt avec sa Juliette. Y’a rien de drôle là-dedans. J'ai bien hâte de voir comment ça va être...

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Journal de Martin, 22 décembre 1998

Envoyé par Cocteau en date du 22 décembre 1998 à 23h16 en réponse à Journal de Martin, 21 décembre 1998 (reçu de Cocteau le 21 décembre 1998 à 22h17).
Le film était pas vargeux, en fait, c'était drôle mais pas tellement crédible. La passe de la fille en garçon et qui redevenait fille en un clin d'oeil. Faut pas nous prendre pour des nonos... Elle avait les cheveux très courts en Thomas et en Viola une longue crinière blonde qui devait soi-disant disparaître sous une perruque... C'était raté comme effet spécial. Une autre affaire qui marche pas: Shakespear tombe quasiment amoureux d'un gars qui se présente sur la scène pour jouer son Roméo et quand la fille qui joue au garçon l'embrasse puis s'enfuit, il ne proteste même pas. Juste un peu surpris. J'aimerais bien ça voir la réaction d'un gars qui se fait frencher par un autre gars devant du monde en plus. Mélanie nous a dit que dans son cours de théâtre, la prof a dit qu'il était possible que le bonhomme soit aux deux, pour le moins, car il a été marié. Éric est parti à rire et a crié "Dégueulasse" quand le pseudo gars a embrassé le beau John Fiennes. Ça ma déçu de sa part. J'veux dire d'Éric. Catherine lui a dit, elle aussi, qu'elle le trouvait bouché! Heureusement que Michel pis les autres niaiseux étaient pas là! Les gens ont le droit d'aimer qui y veulent et comme ils le veulent, on aime ou on aime pas quelqu'un, une personne. Celle que j'aimerai, personne va m'empêcher de l'aimer.

Demain, c'est le party de Noël du CEGEP. Mes parents ont un party, je pourrai donc pas avoir le char. Il faut que je demande à Mélanie de me prendre en passant. Faut aussi que je lui demande si elle veut m'accompagner au party de famille. C'est pas drôle d'être niaiseux de même... J'ai juste à dire à ma mère : Si tu veux pas de moi tout seul à ton maudit party, tu peux donc t'en passer de ma petite personne dans ton christy de party. Excusez-moi! Je suis encore énervé par la soirée. Je pensais vraiment qu'Éric était plus open que ça. Faut croire que c'est rare les gars ouverts d'esprit comme me dit souvent Mélanie quand on jase ensemble. Moi le problème est pas là, pas vraiment.


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Journal de Martin, 24 décembre 1998

Envoyé par Cocteau en date du 24 décembre 1998 à 16h11 en réponse à Journal de Martin, 22 décembre 1998 (reçu de Cocteau le 22 décembre 1998 à 23h16).
Oh! la,la,la! Quelle bizarre de soirée j'ai passé hier soir. Mélanie est venue me prendre vers 7h00 et nous nous sommes rendus chez une copine à elle pour lui fournir un lift. Je la connaissais de vue au CEGEP, mais elle parle à très peu de monde et semble toujours un peu en christ. La gang de Michel l'appelle "la Butch" entre eux-autres! Elle est pas spécialement masculine, mais elle ne fait rien pour s’aider, contrairement à mes meilleures amies, Mélanie et Élisabeth. Tout le monde compare Mélanie à Marjo!

Ce qui fait que rendus chez la fille, nous sommes entrés et nous sommes tombés en pleine chicane de famille. La mère braillait parce que sa fille refusait de mettre la blouse qu'elle lui avait offerte comme cadeau de Noël et menaçait son mari de ne pas l'accompagner dans sa famille s'il donnait de l'argent à sa fille pour venir au party du CEGEP. "Pas de blouse, pas d'argent!" criait-elle en se promenant en jaquette dans le milieu du salon, les bigoudis sur la tête et la face pleine de crème de chez pas quoi! On savait pas où se mettre moi et Mélanie. Martine, la fille que nous allions prendre, avait la face rouge comme une pivoine, pis criait des bêtises à sa mère comme j'oserais jamais le faire à ma Jacqueline de mère... J'aurais un claque illico! Sa mère lui a crié , dret-là, devant nous autres : - Maudite gouine! en la regardant droit dans les yeux.

Je pense savoir ce qu'elle voulait dire. J'en suis pas certain, mais je pense que c'est comme l'équivalent de la Butch que lui servent les hockey-cossommeux! Je pense pas que mes parents puissent jamais me dire une pareille méchanceté. En fait, je leur en donnerai pas la chance...

On se préparait à sortir, le père de Martine à plier pour pas faire de drame. Mais il m'a fait un clin d'oeil en glissant un 20 $ dans mon paletot. - Amusez-vous bien!

On est parti pour le party, mais j'avais les nerfs en boules. Martine se rongeait les ongles en arrière et Mélanie parlait de n'importe quoi d'autres pour meubler le silence, Je répondais en riant, mais j'avais pas le goût vraiment de faire la causette. Rendu là, Martine voulait pas rentrer.
- J'ai pas une cenne pour me payer même un coke...christ!
- Tiens! V'là le 20 $ que ton père m'a glissé en cachette.
- Tu es sûr! - J'te le dit! J'aurais pas le moyen de t'en avancer tant!
Mélanie la prend par en-dessous du bras et la traîne en dedans.
- Pis t'inquiète pas, Martine, moi et Martin, on n'a rien vu, rien entendu! O.K. déclare la Mélanie en me regardant. --- Certain, que j'ajoute sans hésitation, mais sans oser regarder Martine!
La soirée a démarré et tout le monde était en pleine forme. J'ai perdu Martine de vue, elle a rejoint les rares élus avec qui elle se tient au collège. Par contre on s'est retrouvé quand Éric et Catherine sont arrivés, vers 10h00, car Martine est une amie de Catherine. Pour le reste de la soirée, j'ai dansé avec Mélanie et Élisabeth.

Vers minuit, j'ai demandé à Mélanie de m'accompagner demain au party de Noël de la famille. Elle a dit oui, pis là elle m'a regardé et m'a invité à regarder du côté de Martine qui s'était écrasée dans un sofa, paquetée bien raide.
- Toi et elle, c'est du pareil au même, hein Martin! me dit-elle à l’oreille en dansant.
J'étais scié en deux.
-Pourquoi tu dis ça.
-Tu es mon meilleur ami, Martin, et des gars qui ne regardent jamais les filles là où il faut, ça existe, pis c'est même normal, paraît même que s'est gai...mais faudrait qu'on se le dise, Martin! J’ai pas le goût de jouer aux amoureux devant tes mononcles et matantes. En disant ça elle m'a donné un gros bec sur le nez. J'aurais voulu disparaître.

Je reviendrai, pour la suite, je me demande si je jetterai pas ce cahier avant de partir pour le party. De toutes façons, tout le monde va être au party! De toutes façons, c’est à ça que ça peut servir un journal, non ?
JOYEUX NOËL quand même Martin!


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Journal de Martin, 27 décembre 1998

Envoyé par Cocteau en date du 28 décembre 1998 à 23h17 en réponse à Journal de Martin, 24 décembre 1998 (reçu de Cocteau le 24 décembre 1998 à 16h11).
J'ai pas encore eu le temps de bien réaliser tout ce qui vient d'arriver. Je sais pas si je dois faire comme si rien ne s'était passé ou continuer?

Mélanie s'imagine avoir deviné, mais elle a rien deviné. Je n'ai jamais aimé personne, ni femme, ni homme. Je suis toujours vierge. Je suis donc à rien pantoute...

Je sais pas pourquoi j'écris ça. Ça mène nulle part. Je sais ce que je sais...

Martine est retournée chez ses parents ce soir. Elle était allée coucher chez Mélanie après le party du Cegep et ne voulait plus retourner chez elle. Elle est restée toute seule chez Mélanie,la veille et le jour de Noël. Avec, Mélanie, j'ai essayé de la convaincre de rentrer chez elle samedi soir, mais elle m'a envoyé chez le diable, pour pas dire plus... J'ai dormi chez Mélanie, moi aussi ce soir là. On a jasé de tout et rien jusqu'aux petites heures du matin, pis Martine nous a finalement dit que sa mère avait raison de la traiter de lesbienne... Je lui ai dit qu'elle avait jamais dit ça... mais j'aurais dû me taire. Mélanie m'a regardé de travers, pis Martine m'a traité d'épais. En fait, gouine ou lesbienne... moi, j'y connais rien la dedans. On a pas élaboré sur le sujet, c'était le temps de dormir...

Finalement le père de Martine est venu dimanche midi, à la demande de Mélanie qui savait plus quoi faire de Martine, car ses parents à elle devaient revenir de leur voyage en Gaspésie dimanche au soir. Martine a suivi son père à contre-coeur. Mélanie avait pas le choix, pis Martine avait nulle part où aller!

Moi, je voudrais pas être à sa place... mais ça risque de m'arriver un de ces jours. Et je le lui ai dit juste avant que son père arrive... Elle a rien dit, mais m'a pris la main et l'a serrée en pleurant encore... Elle semble complètement déprimée la pauvre fille... Je voudrais vraiment pas être à sa place... Chez nous ...c'est mieux j'pense..sont plus raisonnables. Son père a l'air correct, j'pense, comme mon père. Ma mère est pas comme la sienne.


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Journal de Martin, 28 décembre 1998

Envoyé par Cocteau en date du 29 décembre 1998 à 00h09 en réponse à Journal de Martin, 27 décembre 1998 (reçu de Cocteau le 28 décembre 1998 à 23h17).
J'ai pas eu de nouvelles de Mélanie, ni de Martine. Je suis un peu stressé depuis dimanche soir. J'ai l'impression d'avoir perdu le contrôle. Je sais pas où je vais me retrouver après ça! Mélanie a pas réagi, elle non plus, et elle était là quand j'ai dit à Martine que je risquais moi aussi de passer par le même calvaire qu'elle. Martine doit pas avoir le temps de repenser à ce que je lui ai dit... mais Mélanie,elle...Faut que je parle avec Mélanie, parce que je veux pas qu'elle en parle avec d'autres. Je me sens pas prêt à faire face à tout ça... Je le sais même pas si c'est ça que je veux...

Que veux-tu Martin? Une blonde? Une vie normale? C'est normal, paraît-il! Normal pour qui? Pas pour tout le monde, c'est sûr!

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