sortir?

Envoyé par clara en date du 14 septembre 2003 dans la rubrique Transgendrisme, travestisme et transexualité.
Cela fait maintenant 30 ans que je me suis travesti pour la première fois, c'était avec mes cousines, des vêtements du 19e trouvés dans une malle, panty, jupons, magnifique robe en velours brodée, chapeau à voilette, corsage à dentelles, c'était en 1973 et j'avais les cheveux mi-longs à cette époque, mes cousines jouèrent à me maquiller, et je me suis regardé dans la glace... plus de jeune homme complexé par sa maigreur, surnommé l'araignée, fil-de-fer, mais je croyais voir une de ces filles dont j'étais amoureux...juste un peu trop maquillé. Le bonhuer d'enfin découvrir comment je pouvais aimer mon corps, mes jambes trop longues, mes bras interminables, mon torse plus fin que mes hanches. Triomphant j'arrivais dans le jardin avec mes cousines, et les regards de mon père, de mon oncle, me glacèrent, je restais pétrifié par ce que j'avais déclenché de suspiscion... Immédiatement la famille s'organisa pour me trouver dans les greniers une redingote masculine, un haut de forme... J'enlevais honteux ces magnifiques vêtements, tandis que ma tante me frottait la figure pour enlever le maquillage. A 10 ans, j'étais de ces enfants sensibles, d'un physique ambigu,aux traits trop fins, surprotégés par une mère autoritaire, qui en imposait à tous les hommes par sa vivacité... Depuis tout petit , je ne pouvais sortir dans les magasins sans que les gens disent, "et pour la petite demoiselle?"... les cheveux longs, blond (je suis brun et grisonnant maintenant) , les yeux ocres jaunes, je passais sans cesse pour une fille.
Après cette première expérience, et le long examen permanent qui régna dans ma famille, je ne risquais plus aucun regard extérieur sur mes séances de travestissment... car je continuais malgré tout, la nuit, quand mes parents sortaient, la journée quand je savais disposer d'une heure, et surtout malgré les constantes auto-censure que je m'imposais, devenant bagarreur, ouvertemennt mysogine pour apparaître virilemnt parfait, (bien que mes épaules tardent vraiment à s'élargir). Ce contrôle permanent forgea malgré moi ma personnalité renfermée, et en perpétuelle guerre contre le monde entier, de crainte d'une embuscade comme cette sortie d'enthousiasme dans le jardin.
Plus tard, mon contrôle sur moi-même me fit rater tous les amours de jeunesse, avec ces filles si pressées, car je préférais les garçonnes, celles qui nous imitaient, nous les hommes dans leur affirmation de conquête, et tandis qu'intérieurement la tempête dans mon crâne, pour savoir, si celle-ci accepterait que je me travestisse de temps en temps, par période de crise pour m'apprécier , tandis qu'extérieurement, ma froideur, mon masque d'homme intellectuel et rebelle, les faisait finalement fuir, pas assez patiente à ce jeu du non-dit. Arriva les vingt ans, et l'autonomie des études à Paris, j'aurais pu , dans cette ville anonyme, prendre en main mon destin et affirmer cette troisième voie ou plutôt 4e, de l'homme féminin, symétrique à celle des garçonnes, qui choisissaient, selon les situations leur genre...
L'une d'elles m'a finalement sauté dessus un soir, dans ces années 80, où naissaient les mouvements notables des autres travestis, gays et où , dans les mileuw artistiques , toutes les formes étaient possibles. J'avais essayé d'embrasser un garçon qui me ressemblait au point que l'on nous prenait pour des frères, (mais l'on portait le mêm prénom!!). Mais nous avions éclaté de rire, et sommes séparés d'une poignée de main, comme lorsque l'on dit au revoir à son miroir, avec un sourire entendu... De l'air de dire, inutile de se mentir, inutile de se forcer!
Et elle était arrivé dans ma vie, me prêtant ses robes, expérimentant toutes sortes de jeux entre nous, travaillant ensemble, et puis la trentaine passée avec un enfant, elle s'était lassée du travail en commun, je pense, plus que de moi, et était parti vers d'autres expériences.
J'ai pris internet, pour les rencontres, mais aussi pour commander des tenues, et pour approcher mes semblables, ou celles qui désiraient plus clairement devenir des femmes, pour des temps plus longs, voire plus définitifs.
Mais, aimant les femmes autant que la féminité, la première approche fut un soir dans une boîte de nuit, elle-lui, bi, en femme, moi en homme, mais avec des sous-vêtemnts féminins, pour une discussion, des conseils, pour définir la stratégie de m'assumer en public dans cette féminité intermittente...cette rencontre fut celle d'un autre rejet, pour un autre tri dans un catalogue, pour l'étiquette, pas ceci assez, pas cela autant... Bref, je n'étais pas si travesti qu'il fallait, pas transvesti quand il fallait...
De ce que j'étais potentiellement, dans le champ des possibles, je ne sais qui pouvait le dire, mais cela fut défini, sur la base de quelques mots, réticences, que j'avais prononcé. Dur d'entendre d'une qui me ressemblait que je n'étais qu'un fétichiste sexuel. Sur une de ces insupportables musiques techno roboratives, qui hachait la conversation. Première approche signifie pour moi, retenue, doute et recherche et circonvolutions, plutôt que certitude. Ainsi ce temps s'écoula sans que je fasse plus d'effort vers mes semblables qui, me semblait-il, comblaient leur solitude dans cette tribu , comme cela aurait pu être une autre, dans le monde consumériste sans cesse répétitif et ennuyeux des boîtes et de la fête frivole.
Donc le temps de vivre de 36 à 40ans le libertinage frivole que je n'avais pas vécu à 20,fut celui d'un célibataire libertaire, libertin et libéré de toutes pensées , Séducteur, sans état d'âme, tour à tour bourreau ou victime des coeurs. Des rencontres donc tout à fait hétéro dans le ton, je n'en parlais pas, ou en parlais trop de ces envies, avec celle que je rencontrais, qui partais ou faisait la moue, avant de rencontrer celle qui ne n'aimait qu'en femme, qui me demandait avant chaque rendez-vous, d'enfiler telle ou telle tenue, robe longue ou courte, bas ou collant, mais qui me posait sans arrêt des lapins, femme vivant pour son travail, nouvelle Eve jouant le rôle d'Adam, mais de ces Adam des années 50 qui négligeait leur femme pour leur promotion sociale. J'ai alors vécu la situation de la maîtresse abondonnée dans sa solitude, de second plan... Et j'ai rencontré une femme "normale" qui, ouverte d'esprit, m'accepte dans toutes mes mues, mais s'interroge... sur ce qu'elle pourra à la longue supporter.
Alors ce soir plus qu'aucun autre, j'ai désiré sortir dans cette robe de soirée noire, retourné dans cette boîte de nuit, imposer ma silhouette de mannequin de 2m avec talons aiguille, à ces jalouses qui m'ont rejetté dans mes hésitations, virevolter sur la piste et disparaître comme Lauren Bacall dans la nuit et l'imperméable ambigu, qui peut dissimuler ma robe, quand j'enlève ma perruque...
Je me suis préparé ce soir, mais mon amie a appelé et nous avons parlé, pour préciser nos limites réciproques, je ne peux me comporter comme un homme protecteur, sur de lui, et jouant le rôle du violeur macho, et elle ne peut jouir comme un homme, regarde comme une expérience bizarre mes réticences à être pris comme une femme... aussi garçonne soit-elle...
vais-je rappeler celle qui me veut en femme pour des rendez-vous clandestins, ménager la chèvre et la choue??? Ou continuer à chercher , une femme qui aime les travestis, ou un travesti devenu femme, ou tout à la fois? Ce soir, j'ai failli sortir pour la première fois, à cette heure c'est devenu trop tard...
c'est le chemin difficile, le numéro d'équilibriste qui me plaît! Et merde aux catégories trop simples.
Et je viens de craquer l'épaule de ma robe! Je vais devoir la recoudre!
Clara. ou Gilles .... sont les prénoms qu'avait choisi ma mère.
Bises à tous, à toutes, à toutsies!!!!!
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