Sénégal


Senegal carte

[ Cette carte du Sénégal est extraite de la page Wikipedia consacrée à ce paysl ]
 

Informations colligées par les instances gouvernementales québécoises et canadienne.

 Le ministère de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion du Québec produit un guide intitulé Réalités juridiques et sociales des minorités sexuelles dans les principaux pays d’origine des personnes nouvellement arrivées au Québec rédigé par Olivier Roy du Service de la société inclusive et de l’interculturalisme de ce ministère. Voici une transcription de la section consacrée au Sénégal.

Contexte juridique

L’article 319(3) du Code pénal de 1965 prévoit une peine d’emprisonnement de cinq ans et une amende de 100 000 à 1 500 000 francs, pour toute personne, homme ou femme, reconnue coupable d’un acte impudique avec une personne de même sexe. Les personnes transgenres et transsexuelles ne peuvent pas demander le changement de la mention du sexe sur leurs documents d’identité.

Contexte social

Comme dans d’autres pays africains, des controverses médiatiques ont favorisé la stigmatisation des minorités sexuelles, telles que la révélation de la présumée homosexualité de personnalités publiques et des dossiers sensationnalistes sur la propagation de l’homosexualité. Selon une enquête réalisée en 2014-2015, seulement 3 % des Sénégalaises et Sénégalais sont ouverts à l’égard des personnes de minorités sexuelles, une proportion très inférieure à la moyenne des pays africains (21 %).

Depuis 2009, plusieurs cas d’arrestations arbitraires ont fait les manchettes et les discours et actes homophobes semblent avoir connu une croissance importante, alimentée notamment par certains dirigeants politiques et religieux. La police est peu réceptive à l’égard des victimes d’actes homophobes et transphobes. La violence physique et verbale est particulièrement présente dans le milieu familial et dans le voisinage. On constate aussi un manque de respect en milieu hospitalier. Il n’est pas rare que le dévoilement de l’homosexualité entraîne le rejet familial. Cette situation contraste avec l’existence antérieure, à l’époque coloniale et dans les premières décennies suivant l’indépendance, d’hommes efféminés et transgenres relativement respectés dans la société sénégalaise.

L’hostilité à l’encontre des personnes de minorités sexuelles les oblige à rester discrètes. Le tabou qui frappe l’homosexualité oblige les organisations à agir sous le couvert de la sensibilisation au VIH-SIDA ou à formuler très généralement leur mission; le Sénégal est néanmoins l’un des États africains où ces organisations sont les plus actives et nombreuses. En raison du contexte social hostile, il est difficile pour ces organisations de joindre les personnes de minorités sexuelles qui tendent à demeurer isolées. Les personnes de minorités sexuelles réussissent à se rencontrer discrètement dans certains lieux publics et au moyen d’Internet. Plus généralement, les pratiques sexuelles entre personnes de même sexe peuvent être tacitement acceptées si la personne n’affirme pas publiquement une identité homosexuelle exclusive et maintient une apparence de genre conforme et une relation conjugale avec une personne de sexe opposé ou si elle accepte un mariage, désiré ou de convenance. Les études montrent une très forte prévalence de pratiques bisexuelles, bien que l’homosexualité exclusive semble être plus fréquente au cours des dernières années.

La situation est toutefois plus difficile pour les hommes efféminés et les personnes transgenres : en plus de vivre l’hostilité à laquelle elles peuvent plus difficilement échapper en raison de leur non-conformité de genre, ces personnes subissent les effets du statut moindre de la femme dans la société sénégalaise. Tel est aussi le cas des femmes de minorités sexuelles, qui disposent d’une liberté moindre dans l’espace familial et public et dont les comportements sont davantage surveillés. Il est plus difficile pour elles de contourner les pressions en faveur du mariage hétérosexuel.

Références

  1. ADAMA, et autres (2013), Contribution conjointe des organisations identitaires des HSH, soumis lors de l’Examen périodique universel du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies.
  2. Dram, Fatou Mariam, et autres (2013), « Gay men and other men who have sex with men in West Africa: evidence from the field », Culture, Health & Sexuality, 15(suppl. 1) : 7-21.
  3. Dulani, Boniface, Gift Sambo et Kim Yi Dionne (2016), « Good neighbours? Africans express high levels of tolerance for many, but not all », Afrobarometer Dispatch, n° 74.
  4. Human Rights Watch (2010), Craindre pour sa vie. Violences contre les hommes gays et perçus comme tels au Sénégal, New York.
  5. M’Baye, Babacar (2013), « The Origins of Senegalese Homophobia: Discourses on Homosexuals and Transgender People in Colonial and Postcolonial Senegal », African Studies Review, 56(2) : 109-128.
  6. Office français de protection des réfugiés et apatrides (2014), Sénégal : la situation actuelle des personnes homosexuelles, Paris.
  7. Washington, Département d’État (2017), Senegal 2016 Human Rights Report.

 

Les Cartables nationaux de documentation de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada (CISR) colligent de l'information afin de renseigner les commissaires qui auront à juger les demandes des demandeurs de refuge au Canada. Le cartable sur le Sénégal (section 6) donne de l'information complémentaire sur la situation des minorités sexuelles.

Articles de journaux


«De purs hommes»: Mohamed Mbougar Sarr et le courage d’être soi.
Anne-Frédérique Hébert-Dolbec, ledevoir.com 2018-06-16. 

Mohamed Mbougar Sarr est un brillant observateur de l’humanité. Sa plume sublime, dénuée de tout jugement, explore avec intelligence et perspicacité la source de l’intolérance, des craintes et de la grande solitude que chacun porte en soi.
Dans ce troisième roman, il parvient, par l’exploitation d’un seul thème, à travers son cheminement personnel et la confrontation de ses propres préjugés, à transcender les cultures et les frontières et à sonder l’âme humaine dans ce qu’elle a de plus rassembleur : ses multiples contradictions.
Les purs hommes, ce sont « les seuls au Sénégal à qui on refuse une tombe. Les seuls à qui on refuse à la fois la mort et la vie ». Les góor-jigéen, les hommes-femmes, les homosexuels. Sujet tabou s’il en est un, dans ce pays de la Teranga, qui se targue de son hospitalité, que l’auteur exploite avec sensibilité, sans volonté de choquer, mais plutôt dans celle d’abaisser les défenses.

« En nous taisant sur l’homophobie au Sénégal, nous entérinons l’idée que toutes les vies ne se valent pas ». Hamidou Anne (chroniqueur Le Monde Afrique) 2018-05-17.

Lauréat du Prix littérature-monde qui lui sera remis dimanche 20 mai au festival Etonnants Voyageurs, à Saint-Malo, l’écrivain sénégalais Mohamed Mbougar Sarr, 28 ans, vient de publier son troisième roman, De purs hommes, aux éditions Philippe Rey et Jimsaan. Un livre particulièrement courageux puisqu’il traite de l’homosexualité au Sénégal et interpelle sur l’homophobie qui gangrène notre société.

De fait, au « pays de la teranga » (l’hospitalité, en wolof), il n’y a pas d’un côté des conservateurs homophobes et de l’autre des progressistes qui défendent la libre orientation sexuelle de tout homme. Même chez les intellectuels, artistes et militants de la démocratie existe une homophobie assumée. Certains n’hésitent pas à prôner le meurtre des gays, le prétexte pouvant être la religion ou une illusoire pureté nationale à conserver face aux assauts culturels de l’Occident qui voudrait « nous imposer ses règles ».

Ici, on peut détourner les deniers publics, violer une femme et garder toute sa place dans l’espace public. Mais il suffit qu’un politique, journaliste ou intellectuel soit accusé d’homosexualité pour que soit signé son arrêt de mort sociale. Dire de quelqu’un qu’il est homosexuel est pire qu’une insulte, c’est un appel au meurtre social. Feu le journaliste Tamsir Jupiter Ndiaye, dont l’homosexualité avait été révélée, n’avait jamais pu se relever du lynchage médiatique dont il fut victime. Sa mort sociale avait précédé de peu sa disparition physique.

Spirale de violence lors de la traque d’un étudiant présumé homosexuel à l’université de Dakar.  france24.com 2016-03-17.

Une chasse à l’homme a eu lieu mardi sur le campus de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD). La foule poursuivait un jeune homme accusé d’avoir dragué un autre étudiant sous la douche, donnant lieu à des réactions d’une violence inouïe. Ce déferlement de colère a causé d’important dégâts.

« Ce n’est pas la première fois que ce genre de chasse aux homosexuels arrive à l’UCAD. Depuis 2012, nous avons enregistré neuf cas similaires. Certains de ces étudiants ont dû arrêter leurs études totalement à cause de ces affaires. Ce qui est terrible, c’est que ce sont souvent des "présomptions d’homosexualité ", voire des rumeurs parfois sans fondement qui entrainent ce genre de réactions très hostiles.

De notre côté, nous avons stoppé nos activités de prévention sur la question de l’homosexualité à l’UCAD car nous avions des réactions trop hostiles. Certains de nos membres étudiants n’ont d’ailleurs plus le courage de venir apporter leur soutien à l’organisation. De notre côté, même si nous les encourageons à ne pas renier ce qu’ils sont, nous leur conseillons de cacher leur sexualité, de faire attention aux habits qu’ils portent ou aux comportements qu’ils adoptent. » Djamil Bangoura, président de l'association "Prudence" de défense des droits des homosexuels au Sénégal.

Sénégal : « mariage gay » à Kaolack ou cabale homophobe ?  Jeune Afrique par Mehdi Ba - à Dakar 2016-01-25

Au commissariat, chacun est interrogé séparément – et fermement incité à avouer que cet anniversaire était en réalité un mariage homosexuel. « Ils m’ont demandé de me connecter à mon compte Facebook pour regarder mes photos et vérifier si nous étions en contact les uns avec les autres, mais nous ne nous connaissions pas. Ils ont aussi épluché mes messages sur WhatsApp, Viber et Skype. Mais ils ont constaté qu’il n’y avait rien de louche. Un policier m’a dit : ‘Si tu reconnais que ce sont des gays, je te libère.’ »

« Parmi ces onze personnes, neuf avaient un travail, relève notre militant associatif. Il s’agit sans doute d’une banale affaire de règlement de comptes ou de jalousie. Au Sénégal, l’accusation d’homosexualité est une arme atomique. » Filmés lors de leur interpellation, les onze hommes, dont le visage a fait le tour des sites web sénégalais, doivent aujourd’hui vivre dans la clandestinité par crainte des représailles.


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